Interview Maryse Ewanjé-Epée

[Blackool02]

Interview de Maryse Ewanjé-Epée



Je vous transfère un extrait de l'interview de Maryse Ewanjé-Epée que j'ai faite dans les locaux de RMC.
Dans les Négriers du foot Maryse Ewanjé-Epée a enquêté sur Edel le gardien du PSG victime d'intermédiaires véreux. Son objectif: «médiatiser le côté sombre du football» pour que les joueurs africains ne partent pas n'importe comment en Europe.


Comment vous est venue l’idée de votre livre?

D’abord je n’ai pas eu l’idée de mon livre: elle s’est imposée. Je dirais même qu’on est venu me chercher pour que j’en parle. J’en parlai déjà fréquemment dans mes émissions de radio et de télévision. J’avais une société qui s’appelle Yafoye Events qui produisait des émissions de radio pour toute l’Afrique francophone. Par le biais de ces émissions j’ai été très fréquemment contactée par des jeunes gens qui me parlaient de leur situation et qui me demandaient de les aider, toujours autour du football. J’ai été amenée à rencontrer aussi bien des grands champions africains, que des gamins perdus ou des associations qui s’occupaient de récupérer les gamins qui étaient arrivés en Europe par des biais un petit peu curieux. On va dire que ma voix a porté suffisamment pour qu’un éditeur me demande d’en faire un livre. Avec cette lucarne qu’était la Coupe du monde en Afrique du Sud, cela permettait de médiatiser un côté un peu sombre du football.

Ce n’est donc pas l’affaire Apoula le déclencheur du livre ?

Le déclencheur a été effectivement l’affaire Edel Apoula . Ça a été un très grand scandale en France parce que le PSG risquait de grosses sanctions. Son histoire je la connaissais depuis 2 ou 3 ans parce qu’il cherchait à récupérer sa nationalité camerounaise. Mais je voulais surtout parler de son parcours. Le but du livre ce n’était pas de faire un enquête sur l’âge d’Edel ou de qui que ce soit.

Vous avez quand même fait une enquête très détaillée sur sa carrière depuis sa jeunesse.

La justice fera la lumière sur son âge et sur son nom: ça c’est son boulot. Le procès aura lieu très bientôt. Admettons que Nicolas Philibert l’emporte devant la justice et que Edel n’avait pas 15 mais 19 ans au moment de quitter le Cameroun, je ne pense pas que cela change grand chose. J’ai moi-même une fille de 19 ans, je ne la laisserai pas partir dans n’importe quelles conditions en Arménie ça c’est très clair. Cela m’a intéressé de savoir comment on prend un jeune, comment on bouleverse sa vie, comment on l’emmène dans un pays étranger en lui faisant croire que c’est la France – ou que c’est comme la France – et comment on l’abandonne pendant 4 ans là-bas. Edel a réussi par ses propres moyens, en se sauvant tout simplement. Il a même été condamné pour ça: pour s’être sauvé de son « club d’achat ». Comment on peut lui réclamer des années après une somme d’argent ? Surtout que Nicolas Philibert n’est pas un agent. Il dit tout simplement que c’est une dette banale qui n’a rien à voir avec le football. J’avais beaucoup de mal à le croire et c’est sur tous ces aspect là que j’ai enquêté: sur les quelques dizaines de personnes que Nicolas Philibert a fait partir partout dans le monde qui lui devraient des sommes d’argent qui n’ont rien à voir avec le football.

Lorsque l‘on lit votre ouvrage, on a le sentiment que c’est impossible d’être honnête dans le milieu du football professionnel africain.

Dans le livre il y a deux types de parcours: celui des jeunes gens victimes de la traite des footballeurs puis il y a le parcours de personnes fantastiques qui ont œuvré pour la défense de ces jeunes footballeurs (Manifootball , Jules Kodjo , Diambars etc…). Alors c’est vrai que à plusieurs reprises en me relisant je me disais « il n’y a pas beaucoup d’espoir dans ce que tu écris ». Pourtant j’ai la sensation que pendant les vingt dernières années où s’est déroulée cette lutte contre l’exploitation de l’être humain par l’être humain dans le sport, il y a beaucoup de choses qui se sont passées. Un certain nombre de pays commencent à se prendre en charge.

L’impact de ses initiatives n’est-il pas trop limité ?

Pour moi l’expérience de Diambars (l’association de Jimmy Adjovi-Boco, Patrick Vieira, Saer Seck et Bernard Lama, ndlr) au Sénégal est extrêmement positive. Les autorités commencent à travailler, le gouvernement et la fédération sénégalaise de football aussi parce qu’ils ont compris que le rêve doit rester africain comme l’a montré la très belle dernière Coupe du Monde… Enfin belle, on va dire en général, pas pour la France en tout cas ! Il faut absolument que les Africains se saisissent de leur football, qu’ils élèvent le niveau, que les championnats locaux soient bon pour que les jeunes n’aient pas envie de partir tout de suite vers l’Europe. Que ces jeunes fassent leurs preuves dans leur pays, qu’ils fassent de bons internationaux ensuite !

Mais les revenus des championnats locaux ne pourront jamais retenir les footballeurs africains de vouloir migrer vers l’Europe

On peut dire que le souci est la pauvreté mais je ne suis pas d’accord. Il y a un véritable exode qui n’existait pas il y a trente ans. Autrefois c’était seulement les meilleurs qui partaient. Ce qu’il faut bien dire aux Africains qui s’en vont et qui se disent « je gagnerais mieux ailleurs », c’est qu’ils ne sont pas attendus. Sur les milliers qui s’en vont, il y en a que quelques-uns qui réussissent, les autres n’ont pas le niveau international. Ils ne vont pas gagner de l’argent. Ils vont mourir ! Au sens propre. Là je suis tout à fait sérieuse et on le voit très bien dans le film de Pascale Lamche. Ils vont mourir tout simplement. Ils vont partir dans certains pays et ils mourront de faim. Les autres finiront dans la clandestinité, certains même dans la prostitution. Il faut arrêter de faire croire aux Africains que tout le monde peut réussir. Ce n’est pas possible, on ne peut pas tous partir et se dire qu’à la force de nos jambes on va réussir. Le talent ça ne s’invente pas. On peut bosser très dur mais le talent c’est comme une pépite, ça n’est pas donné à tout le monde et ça il faut le dire.

J’ai été assez marqué par votre style et l’emploi d’un vocabulaire très africain. Quel en était le but ?

J’avais besoin de me plonger dans l’ambiance et je savais que je racontais une histoire pas très gai dans une période gai. On était en pleine période de Coupe du Monde. Je voulais lui donner un ton, une sorte d’humour un peu détaché. Comme on peut le voir quelques fois en Afrique où on est capables de sourire y compris des plus grands malheurs. Il n’y a pas de fatalité, on peut combattre de façon positive. Moi je suis né ici en France, j’ai des origines africaines par mon père mais françaises par ma mère et espagnoles par mon grand-père. J’avais aussi besoin de me plonger dans cette Afrique que j’essayai de décrire. Je faisais ma propre éducation par ces recherches linguistiques, historiques et géographiques qui me servent beaucoup.

Vous connaissez d’autres auteurs qui écrivent comme ça?

Ah non je suis unique! C’est mon style à moi j’écris toujours de façon… humoristique on va dire.

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Blackool02

[omzebest13]

Très interessant et j'aime beaucoup le coté qu'elle favorise dans cette affaire.
Parce que c'est vrai que nous on voit que le coté "faux" et tout, mais c'est vrai que c'est un grand bouleversement dans sa vie et une sorte de manipulation quoi.

[Maldini76]

Merci de nous faire partager
Au travers des liens que tu mets je vois que tu fais ton bonhomme de chemin et c'est mérité car tu as du talent et de l'envie
Je connaissais l'athlète mais pas forcément son combat et c'est très bien d'évoquer ce qui peut s'apparenter à une "traite des noirs" des temps nouveaux (toutes proportions gardées cependant). Quand je jouais au foot on a vu débarquer de africains ne parlant pas français aux entrainements cherchant un club et un toit après qu'on leur ait promis monts et merveilles.
Cela existe apparemment dans l'athlétisme aussi avec les kenyans.

[26Mai1993]

Merci Black. J'aime bien Maryse Ewanjé-Epée, ds ce qu'elle dit chez Moscato. Interview intéressante. Elle parle d'une facette que l'on connaissait pas forcément, ou du moins que l'on se doutait moins.

[Alexinho]

Ses recherches sont intéressantes et elle parle du sujet qui serait bon de connaître.

Pour moi c'est ça le vrai journalisme. Aller chercher derrière les choses.

[elephant]

Ca donne super envie de lire le bouqin du coup.
Personnellement c'est un truc que je connais assez bien parce que mon père est medecin du sport a Abidjan et voit defiler pas mal de jeune les étoiles plein les yeux, dont on a plus de nouvelle par la suite. Y'a même eu a une époque des gamin qui se sont enfuient dans la nature pendant une petite compétition en france.
C'est gravissime et c'est très bien qu'on en parle enfin.
Mais les premier qui sont en cause, sont les vendeur de rêve locaux. En Côte d'ivoire encore on a pas mal de centre de formation plutot bon, ca empeche pas qu'il y'a parfois ce genre de situation, j'imagine même pas dans les autres pays avec une fédération moins organisée.

[Pedro]

Merci pour l'interview, vraiment très très bien ! Je l'aimais déjà bien avant mais là encore plus^^ C'est bien qu'il y ait des gens qui se penchent sur ce sujet.

[Blackool02]

C'est gravissime et c'est très bien qu'on en parle enfin.
Mais les premier qui sont en cause, sont les vendeur de rêve locaux. En Côte d'ivoire encore on a pas mal de centre de formation plutot bon, ca empeche pas qu'il y'a parfois ce genre de situation, j'imagine même pas dans les autres pays avec une fédération moins organisée.

Je pense que les responsables sont un peu partout, je pense aussi aux footballeurs qui ont réussi. Ce sont eux que les jeunes veulent imiter et ils devraient agir beaucoup plus pour les calmer voire les aider. Le problème c'est qu'on ne garde en tête que le beau côté des carrières de joueurs. Dans le cas d'Apoula ou même de Samuel Eto'o c'est quand même terrible ce qui se passe. Apoula était bloqué en Arménie où il jouait sans contrat de travail pour un salaire ridicule. C'est seulement lorsqu'il s'est enfui qu'il s'en est sorti. Eto'o est arrivé très jeune en Europe et a vadrouillé pour trouver un club, lorsqu'il fait un essai au PSG, il est refusé parce qu'il est sans-papiers. Vous imaginez un garçon d'une quinzaine d'année qui se balade dans le pays sans titre de séjour? C'est déjà assez difficile pour un adulte.

On a reçu dans notre émission de radio la semaine dernière Jimmy Adjovi-Boco (ex-international béninois qui a joué à Lens notamment) qui a crée un centre justement pour lutter contre ce phénomène en partenariat avec Patric Vieira et Bernard Lama. Le podcast est ICI

[elephant]

On a reçu dans notre émission de radio la semaine dernière Jimmy Adjovi-Boco (ex-international béninois qui a joué à Lens notamment) qui a crée un centre justement pour lutter contre ce phénomène en partenariat avec Patric Vieira et Bernard Lama. Le podcast est ICI

Deja c'est très bien que des gens de cette stature se mobilise, mais il faudrait beaucoup, beaucoup plus. Pour reprendre l'exemple de la CIV, on a enormement de bon centre de formation, une fédération très bien organisé pour une fédé d'afrique noir, mais ca empeche pas ce genre de situation.

Faudrai une enorme campagne de sensibilisation en commençant par les parents. On le dit pas assez mais ces derniers souvent mettent enormement de pression sur leur jeunes enfant, en revant que ce soit le prochain Drogba ou Eto'o.

J'espère que vu comment la lutte est partit, on ne voit plus cela dans l'avenir, c'est effrayant. Et en plus pour beaucoup ils diminuent leur age, c'est extremement dangeureux du point de vu medical.

[Blackool02]

Pour les parisiens que ça interesse, j'organise une conférence sur le sujet:

FACE AUX DERIVES DU SPORT, L'AFRIQUE S'ORGANISE

Conférence organisée par l’ADEAS

SAMEDI 19 MARS 2011 (10h-14h)

Paris 4 Sorbonne, Centre universitaire Malesherbes, Amphi 128, (Métro 3 Malesherbes)

Chaque année des milliers de jeunes sportifs sont victimes de trafics pouvant s’apparenter à une traite moderne. De nombreux enfants voient leur destin brisé par le désir d’embrasser la carrière de sportif de haut niveau en quittant leur pays. C’est pour remédier à cela que plusieurs organismes tels que DIAMBARS ou GIVING BACK ont été fondés.

Dans un premier temps nous exposerons les différents problèmes liés au manque d’encadrement des jeunes sportifs en Afrique. Puis nous laisserons les associations GIVING BACK et DIAMBARS, exposer leurs modèles de formation et d’action envers les jeunes. La conférence sera ponctuée d’interventions du public et de diffusions de court-métrages.

INVITES

DIAMBARS
Pierre Mbas, chef de projet et développement des partenariats
Bernard Lama, membre fondateur de Diambars, champion du monde 98 et champion d'Europe 2000 avec l'équipe de France de football

GIVING BACK
Babacar SY, Président de Giving back et scout NBA au Memphis Grizzlies
Karim OUATTARA, Responsable du programme des ambassadeurs, basketteur professionnel en proB, dîplomé de l'université d'Albany aux Etats unis
Souarata CISSE, Ambassadeur de l'association international espoir de basket-ball


PROGRAMME

10h-10h30 Accueil
10h30-10h45 Ouverture : Samba Doucouré, Président de l’ADEAS
10h45-11h30 Les jeunes sportifs africains sont-ils victimes d'une traite moderne ? Pierre Mbas
11h30-12h15 Présentation de Diambars : Pierre Mbas
12h15-13h00 Présentation de Giving Back : Babacar Sy
13h-13h30 Quelles autres solutions pour demain ? : Discussion entre les intervenants, les invités et le public.
13h30-14h00 Conclusion

[Julio]

Tu restes seulement 15min ou c'est juste ton temps de parole ?

[Blackool02]

C'est mon association qui organise donc je suis là du début à la fin.

[omzebest13]

Vraiment intéressant, tu nous feras un petit compte rendu, car quand on est pas parisien, difficile ! ^^

[Blackool02]

Je remet le couvert cette année pour les parisiens que le sujet intéresse, je serais une nouvelle fois le maitre de cérémonie

Conférence-débat: Foot-business, comment protéger les sportifs africains ?
Samedi 19 mai de 10h à 17h
au Centre universitaire Malesherbes 108 boulevard Malesherbes 75017 Paris


Chaque année des milliers de jeunes sportifs sont victimes de trafics pouvant s’apparenter à une traite moderne. De nombreux enfants voient leur destin brisé par le désir d’embrasser une carrière de sportif de haut niveau en quittant leur pays. L’ADEAS organise une conférence afin d’informer le public sur ces dérives du sport qui sont malheureusement encore trop méconnues. Ce sera l’occasion de discuter avec les acteurs associatifs qui luttent pour remédier à cette problématique.
Au programme, des nombreuses interventions sont prévues avec entre autres : Giving Back, association sportive de Basket qui mène, depuis 1995,des actions socio-éducatives et humanitaires destinées aux jeunes sportifs ; l'association Diambars, fondée par Bernard Lama, Patrick Vieira et Jimmy Adjovi-Boco a pour objet de former des jeunes sportifs au métier de footballeur tout en les accompagnant dans leur cursus scolaire.

Le déroulement de la journée :

Matin :

Projection du film Black Diamond de Pascale Lamche
Échanges avec le public

Intervention de Pierre MBAS et Jimmy ADJOVI-BOCO de l'association Dimbars.

Après-midi :

Présentation des associations Giving Back et France Bénin Football+ et échanges avec le public

Table ronde avec d’anciens footballeurs africains, agents de joueurs et militants associatifs : « Les jeunes footballeurs africains sont-ils victime d'une traite moderne ? »
Avec la participation de Maryse Ewanjé-Epée (Négriers du Foot) et Alain Devalpo (Chair à ballon)


Entrée libre.

Pour de plus amples informations, n'hésitez pas à consulter notre site internet : www.adeas.fr ou à nous contacter par email à l'adresse suivante : adeas2004@yahoo.fr

Merci d'avance de diffuser cet évènement autour de vous.

Amicalement,

Les membres de l'ADEAS

[Vinssa"]

Est-ce qu'il serait possible d'avoir des comptes rendus de ce qui se dit de ces interventions ou pas ?

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